Intro
Il était une fois Cressy…
Il y a trois mois, nous sommes arrivées à Cressy afin de réaliser une enquête de terrain. Nous avons découvert un quartier périurbain datant d’une dizaine d’années et réparti sur les communes de Bernex, Onex et Confignon. C’est au local du BUPP que nous avons rencontré les jeunes et les Travailleurs Sociaux Hors Murs (TSHM). Dans ce lieu, nous avons noué les premiers liens et pris connaissance des problématiques qui se jouent dans le quartier. Ces dernières se cristallisent essentiellement autour du bruit dont les jeunes sont désignés responsables. Sur la base des témoignages recueillis et de nos observations de terrain, nous avons constaté qu’il n’est pas toujours simple d’allier les différents modes de vie dans un quartier dont on n’a pas choisi l’architecture ni les infrastructures, et où différents types de populations se côtoient.
Le quartier
Au coeur de Cressy :
Nous avons réalisé une balade au cœur de Cressy avec Julien, un jeune du quartier de 23 ans. Grâce à son regard et à son ressenti, différentes thématiques sont ressorties de cette immersion. Nous nous sommes tout d’abord longuement arrêtés sur le préau de l’école primaire. Ceci n’était pas le fruit du hasard, puisque Julien l’a décrit comme étant le « spot » de rassemblement de la jeunesse de Cressy. Cela nous a permis de mettre en lumière le besoin de créer des liens sociaux entre jeunes à proximité de leur lieu de vie. Toutefois, selon Julien, le préau, en raison de sa situation dans le quartier et de son architecture bétonnée, est un catalyseur de tensions autour du bruit entre certains voisins et les jeunes.
Nous avons poursuivi la discussion sur la réaction que provoque la présence des jeunes dans l’espace public, notamment en lien avec les nombreux contrôles de police et de sécurité qui ont été mis en place par les autorités communales.
Au fil de l’échange, nous nous sommes rendu compte que le préau n’est pas qu’un lieu choisi : il est aussi un lieu de repli pour les jeunes lorsque les structures qui leur sont dédiées (local jeunes (18-25 ans), local du BUPP) ferment et que l’envie de rester ensemble est plus forte que le froid hivernal. Cet élément du discours de Julien nous a permis de mettre le doigt sur la problématique de la place des jeunes dans le quartier.
En fin de parcours, Julien nous a confié aimer son quartier et souhaiter s’y investir afin de favoriser une meilleure coopération entre les jeunes et les habitants se plaignant de nuisances sonores.
À l’issue de notre rencontre, voici les principaux questionnements que nous vous proposons d’explorer au gré de notre page web :
- Quelles sont les problématiques ressenties par Julien et les personnes interviewées en termes de tensions intergénérationnelles dans les espaces publics de leur quartier ?
- Quelle est la place de la jeunesse de Cressy dans l’espace public ?
- Quels rapports la jeunesse entretient-elle avec les autres intervenants (TSHM, police) ?
Quoi de mieux pour nous aider à étayer notre analyse que la parole des habitants de Cressy ? C’est la raison pour laquelle nous avons également réalisé sept entretiens, dont trois avec des femmes adultes : Carole, Chantal et Gizelle (une enseignante de l’école), et deux jeunes adultes ainsi que deux adolescents : Carlo, Sébastien, Laurie et Léo (prénoms d’emprunts) afin qu’ils nous parlent de leur manière de vivre au sein du quartier et de cohabiter avec les différents membres de la communauté cressinoise.
Lieux emblématiques de Cressy:
le préau
À travers les entretiens réalisés, nous avons constaté que le préau de Cressy se trouve au cœur de l’attention et de la tension. En effet, l’école est utilisée de manière différenciée selon les acteurs qui la fréquentent. Pour les parents qui déposent leurs enfants et pour les élèves, il s’agit d’un espace fonctionnel. Pour la jeunesse qui « galère » à trouver un lieu propice à l’échange les soirs de semaine et le week-end, le préau est un « spot » de rassemblement.
Le préau un « lieu intercalaire » par excellence (Breviglieri, 2007) :
L’adolescence est une période transitoire entre le monde de la famille et le domaine public. Le passage se réalise à travers des espaces intermédiaires, qui se trouvent entre l’arène publique et l’univers de l’enfance, comme les préaux. Pour découvrir le domaine public, l’adolescent investit ce que l’auteur Breviglieri appelle des espaces intercalaires. Ces interstices (recoins, cachettes, cages d’escaliers…) sont proches de son univers d’enfant. Dans le cas de Cressy, il s’agit essentiellement du préau de l’école primaire.
Le préau, un lieu de rassemblement par défaut au vu de l’absence d’autres lieux ou de l’inadéquation des infrastructures destinées à la jeunesse du quartier :
À la construction du quartier il y a plus d’une dizaine d’années, beaucoup de familles y ont emménagé. Les enfants d’il y a dix ans sont devenus les adolescents et les jeunes adultes d’aujourd’hui. Le quartier étant petit, des amitiés se sont rapidement créées, ce qui a laissé place à des rassemblements d’une vingtaine de jeunes.
Arrivés à l’adolescence, les jeunes ont envie de se retrouver entre amis. Cependant, tous les témoignages nous ont fait prendre conscience d’une réalité : Cressy manque de lieux pouvant accueillir des groupes conséquents sans déranger le voisinage. De plus, les lieux de divertissement sont rares, voire inexistants, et cela est d’autant plus vrai le soir.
Certes, les jeunes adultes du quartier âgés de 18 à 25 ans ont obtenu un local pour se rassembler, mais l’espace qui est mis à leur disposition est peu adapté à leurs besoins en raison d’une accessibilité limitée. Premièrement, le lieu se situe en dessous de l’école primaire de Cressy ; ils ne peuvent donc pas y aller quand ils le souhaitent. Durant les vacances scolaires, ils n’ont pas l’autorisation de s’y rendre. Deuxièmement, les jeunes estiment que les horaires instaurés sont trop restreints. Ils ont accès au local jusqu’à 22h00 durant la semaine. Le week-end, ils peuvent y rester de 18h00 à 00h00. L’idéal pour eux serait qu’ils puissent bénéficier d’un espace facile d’accès en dehors de l’école primaire et avec des horaires allongés correspondant à leur style de vie. En effet, les jeunes ont tendance à rester ensemble après la fermeture du local et à poursuivre leur soirée sur le préau.


Le seul lieu où l’on peut se retrouver entre amis est le tea-room. Seulement, celui-ci n’est pas un lieu privilégié par la jeunesse, qui se regroupe souvent en grand nombre et dont l’intérêt est d’être ensemble pour discuter, sans forcément avoir à consommer dans un espace essentiellement fréquenté par des personnes plus âgées.
« La plupart du temps on est sous l’école. (…) parce qu’on n’a pas où aller autre part. Cressy c’est petit, puis voilà quoi. » Sébastien, 21 ans
L’une des alternatives serait d’inviter ses amis à la maison. Cependant, les jeunes ne sont pas tous logés à la même enseigne. En effet, des possibilités liées à l’éducation, à la culture, mais également aux inégalités de logement, font que tous les jeunes ne peuvent pas recevoir des amis à la maison et sont ainsi contraints de se retrouver dehors.
« Combien de fois en été ils sont sous le préau. (…) Il faut bien qu’ils se regroupent quelque part. (…) Personnellement, je préfère qu’ils boivent leur coup chez moi avant d’aller en boîte plutôt que dans un préau. Il (son fils) sait qu’il peut faire ça chez lui. Je ne sais pas s’ils peuvent faire ça chez eux ». Chantal
vivre-ensemble
« On galère la plupart du temps puis on fait pas mal de bruit, ça résonne. » Julien, 23 ans
Les résonances en provenance du préau provoquent des conflits avec les adultes habitant à proximité de celui-ci. S’installe alors « un rapport de force » entre les jeunes qui l’investissent et les habitants dérangés par le bruit.
« Cressy, c’est en deux parties. Il y a les HLM et ceux qui ont plus les moyens. Ils ne réagissent pas forcément pareil. » Julien, 23 ans
À la suite des divers entretiens réalisés auprès de la jeunesse et des adultes du quartier ainsi du récit de Julien, nous avons constaté que la zone d’immeubles dans laquelle résident certains propriétaires est un lieu autour duquel s’articulent de nombreuses tensions. Une TSHM du local du BUPP souligne toutefois que le groupe d’habitants se plaignant des nuisances sonores des jeunes n’est pas uniquement constitué des habitants des bâtiments propriétaires.


Cette citation montre qu’en fonction des différents modes de vie et de l’âge de certains habitants, la sensibilité face au bruit n’est pas la même.
Selon les sociologues Marie-Paule Thomas et Lucas Pattaroni (2012), il existe une qualité de vie propre à la configuration de chaque quartier, ainsi que des modes de vie intrinsèques à chaque habitant.
Du point de vue de « la qualité sensible », soit le ressenti et l’expérience sensorielle individuelle de chacun face à son environnement, certains habitants de Cressy semblent avoir des exigences et des critères liés au calme pour considérer leur quartier comme agréable à vivre.
Cependant, bien que Cressy se situe en moyenne campagne, il est difficile de satisfaire cette exigence en raison de l’architecture bétonnée et de la composante familiale du quartier. A contrario, les jeunes semblent plus attirés par un environnement vivant que par un cadre tranquille. D’ailleurs, lorsque nous les avons interrogés sur leur mode de vie, ils prenaient davantage en considération la « qualité sociale », soit la nature des relations interpersonnelles entre les habitants. Les jeunes privilégient une vie collective intense et attendent que leur lieu de vie offre des supports, des infrastructures pour qu’ils puissent se regrouper, discuter et rire. Il y a une forte proximité entre les jeunes du quartier :


tensions
La différence de mode de vie entre les jeunes et certains habitants de Cressy peut mener à l’incompréhension des besoins et des attentes de chacun en matière de cohabitation. À Cressy, un climat de tension entre différents groupes d’appartenance est palpable.
« Moi je suis pas gênée par le bruit d’une manière générale mais je sais que pour certains ils ne supportent plus. Je sais qu’il y a eu des histoires, des habitants qui font des pétitions. » Carole, 37 ans
Derrière les tensions se logerait une crainte, voire « un sentiment d’insécurité civile » face à l’effet de groupe que produisent les jeunes.
« Moi j’ai déjà entendu que c’était peut-être l’effet de groupe. J’ai déjà entendu comme quoi les gens ont peur de passer le soir ou quoi, de laisser leurs enfants et tout, j’sais pas pourquoi… pourtant nous, les plus grands un peu, on ne fait rien de spécial. Après les plus petits, ils ont un peu l’âge… de faire des bêtises quoi. » Carlo, 21 ans
« Quand il y a une quinzaine de jeunes et qu’ils sont assez excité, on se dit que s’ils ont bu ou autre… on ne sait jamais ce qu’il leur passe par la tête. Pour ma part, s’ils font trop de bruit je n’oserais pas leur faire une remarque. » Carole, 37 ans
interventions
Certains habitants, excédés par la nuisance sonore en provenance du préau, font appel à des intermédiaires externes tels que la police municipale pour qu’elle agisse auprès de la jeunesse de Cressy. Ce procédé devient pesant et a tendance à agacer les jeunes qui se retrouvent dans l’incompréhension et dans l’absence de communication avec ces habitants. De plus, suite aux plaintes successives des habitants autour de l’école, une nouvelle mesure a été mise en place avec la présence d’un agent de sécurité ayant pour mission de surveiller le préau tous les soirs de 22h00 à 4h00 du matin.
« C’est-à-dire qu’à partir d’une certaine heure… 20h (rire) les gens appellent la police au lieu d’aller leur parler (…) Mais aussi, si vous leur parlez avec un ton respectueux, il n’y a pas de soucis ». Gizelle, enseignante
Les jeunes nous ont tous affirmé qu’ils souhaiteraient davantage entrer en dialogue avec les plaignants plutôt que ces derniers appellent la police (APM) directement. Selon le ressenti des jeunes interrogés, la distance sociale qui se crée entre eux et les adultes peut déboucher sur un sentiment de stigmatisation chez les jeunes du quartier.
« Dès qu’ils voient le groupe, en fait, ils appellent direct les flics. » Laurie, 15 ans


Réactions
« Bah, ils (police) tournent beaucoup en voiture, ils nous observent et il y a des civils des fois qui viennent et en général, ils viennent nous parler. » Laurie, 15 ans
« De toute façon, ils (les Securitas) passent tout le temps, tout le temps, tout le temps ». Julien, 23 ans
Les témoignages de « ras le bol » des jeunes face à l’omniprésence de la police et des Securitas nous ont aussi permis d’établir un lien avec » l’effet de marquage « que Chamboredon (1971) décrit comme un mécanisme prenant place à la suite d’une réaction de la population civile à propos de la présence des jeunes dans l’espace public. Ceci engendrerait une réponse politique sécuritaire matérialisée par un « contrôle permanent » de la police et des agents de sécurité à l’encontre des jeunes sur les lieux de rassemblement avant même qu’ils commettent d’éventuels actes répréhensibles.
La jeunesse de Cressy, sous pression, réagit de deux manières. Soit par le repli, soit par le défi des autorités. Leur moyen de repli est de quitter le quartier pour aller dans un autre, mais cela engendre d’autres tensions avec d’autres groupes de jeunes :
« (…) Quand on va tout un groupe dans un autre quartier, il y a de la rivalité et on se retrouvait à s’embrouiller, des trucs comme ça… et c’était un peu galère, alors qu’on ne pouvait même pas rester dans notre propre quartier ». Sébastien, 21 ans
Concernant le rapport de certains jeunes avec les autorités, il se peut qu’ils les provoquent, les défient au travers du jeu « du chat et de la souris ».
« (…) Eux ils ne kiffaient vraiment pas, ils ne comprenaient pas pourquoi ils se faisaient contrôler (leurs identités). Au bout d’un moment, ils se sont tous mis d’accord pour que quand la police elle vient, ils partent en courant. (…) Ça leur met de l’adrénaline et s’ils se font arrêter, ils ont une raison pour quoi se faire arrêter. Ils en avaient marre de se faire arrêter pour rien. » Sébastien, 21 ans
« La police vient effectivement, mais elle vient avec les sirènes donc tout le monde s’éparpille de part et d’autre. C’est vrai que pendant l’été, on a eu l’impression que c’était un peu un jeu pour les jeunes de voir arriver la police. « ouaahhh il y a la police » et après ils courent dans tous les sens. » Carole, 37 ans
Toutefois, il est aussi important de relever que, lors de notre immersion au sein de ce quartier, les réactions sociales envers les jeunes n’étaient pas uniquement négatives. Les deux habitantes que nous avons interviewées, Carole et Chantal, bien que témoins des tensions entre les jeunes et les adultes, avaient une posture plutôt empathique et bienveillante vis-à-vis de la jeunesse de Cressy.


« Les jeunes sont exactement comme nous il y a 20 ans. (…) On a tous fait la même chose, on a tous été bourrés, on a tous fait en groupe les cons dans la rue. Ils sont exactement comme nous (…). Pour moi, la jeunesse c’est cyclique, on est tous les mêmes. C’est cette période-là qui est un peu charnière, il faut effectivement qu’ils soient cadrés chez eux. Mais après, dehors en groupe, faut pas rêver. Moi, j’ai des enfants super bien élevés mais je pense que dans le bus à 10 personnes, ça ne devait pas être les plus polis du monde. Mais ça fait partie de leur développement. » Chantal
À travers leurs témoignages, Carole et Chantal montrent que la jeunesse est une étape de vie inévitable et qu’elle implique des comportements qui lui sont propres et qui peuvent être perçus comme dérangeants par certains adultes. Finalement, elles nous amènent à relativiser d’une part en affirmant qu’ils ne constituent pas une menace et que leurs propres enfants ont pu avoir des comportements incivils et, d’autre part, en rappelant qu’elles aussi ont été adolescentes.
Selon Carole, la jeunesse est aussi une ressource qui peut s’investir auprès de la communauté du quartier :
« Je pense que c’était plutôt une idée de la part des communes pour regrouper les différents habitants ensemble. Il y a eu des différentes associations qui ont pu tenir un stand et des jeunes qui étaient là par l’intermédiaire des » jobs jeunes »… » Carole, 37 ans
conclusion
« Une fois, un habitant est venu et nous a dit : vous faites trop de bruit, patati patata, je viens au lieu d’appeler la police. Ça nous a fait plaisir. (…) J’aimerais surtout qu’on arrive à trouver une solution pour que ça aille pour les habitants qu’on reste ici, trouver un compromis. » Julien, 23 ans
« Après je pense que chacun devrait faire un petit effort. Je pense les habitants qui font des pétitions et tout ça. Un quartier très silencieux, vu la composition ici, ça ne va pas être possible. » Carole, 37 ans
Ces deux citations démontrent qu’il existe une volonté, chez les jeunes comme chez les adultes, de trouver un terrain d’entente. Pour cela, il est important de coopérer. Selon Sennett (2012, p. 17), « la bonne coopération serait une coopération exigeante et difficile qui essaie de relier des gens qui ont des intérêts différents, voire contradictoires. » En effet, la coopération implique un déplacement de soi vers le terrain de l’autre, une écoute et une compréhension mutuelles.
Dans une optique de cohésion, le TSHM a un rôle important à jouer de médiateur, de tiers-liant entre la jeunesse et les adultes. Une médiation a déjà eu lieu ; cependant, elle n’a pas abouti à une résolution du problème sur le long terme.
« Alors on en a parlé avec les TSHM… et ils ont fait cette médiation mais… ils se sont calmés on va dire pendant un mois et après ça a repris. » Carlo, 21 ans
La difficulté du mandat des TSHM est de trouver un équilibre entre les acteurs en opposition et (ré)ajuster leurs actions pour amener les habitants à coopérer. Raquel, une des TSHM du local du BUPP, nous a d’ailleurs confié aborder régulièrement le sujet du conflit intergénérationnel et discuter les représentations des jeunes envers les habitants plaignants et vice versa. Son objectif est d’expliquer les différents modes de vie et besoins de chacun afin d’encourager un dialogue et une meilleure entente entre les jeunes et les adultes.
« C’est vrai que les TSHM ont un rôle ici qui dépassent un petit peu leur mandat qui est simplement travailler avec le jeune. C’est un aspect un peu plus communautaire, ce qui est une bonne chose, je pense ». Carole, 37 ans
À travers leurs actions, les TSHM tendent vers une meilleure cohésion sociale dans un territoire donné. À Cressy, ils utilisent aussi des moyens de médiation tels que « le triporteur », outil permettant de se déplacer dans le quartier, d’aller à la rencontre des habitants – enfants et adultes – en mettant à disposition des jeux de société pour favoriser la création de liens sociaux. Il y a également les repas communautaires organisés les vendredis dans le local du BUPP dans l’optique de créer des espaces conviviaux entre générations et différentes cultures. Rappelons que le travail des TSHM n’est pas uniquement basé sur l’accompagnement des jeunes, mais il se fait à l’échelle d’une commune. Ceci implique une intervention auprès de toutes sortes d’habitants et la collaboration avec divers acteurs (politique, association, police, employés communaux, etc.).
La coopération ainsi que le dialogue requièrent certes plus d’efforts, mais cela permettrait, malgré les désaccords, de mobiliser les habitants de Cressy autour d’une solution commune. Ainsi, des forums/cafés citoyens réunissant les différents acteurs impliqués dans la vie du quartier pourraient être organisés. Nous imaginons par exemple qu’une demande d’aménagement concernant une infrastructure (lieu de rassemblement) qui réponde d’une part, aux besoins des différentes jeunesses (15-25 ans) et, d’autre part, au besoin de quiétude de certains habitants pourrait être élaborée. Toutefois, ce lieu de rencontre pour les jeunes ne doit pas devenir un moyen de mettre ces derniers à l’écart des espaces publics socialement partagés par tous les citoyens de Cressy. Rappelons que c’est en expérimentant et en s’exposant dans les lieux publics que les jeunes construisent peu à peu leur identité citoyenne. En effet, s’ancrer et trouver leur place dans la communauté de proximité est la première étape devant les conduire à trouver leur place dans la société. En plus de la redéfinition d’une structure pour la jeunesse, il serait intéressant de penser ensemble, urbanistes et habitants du quartier, à des améliorations réalistes en termes d’aménagement de l’espace du quartier. Si les murs ne peuvent pas être poussés et le béton enlevé, des arbres et de la verdure pourraient être plantés et/ou des murs anti bruit installés afin d’absorber les résonnances en provenance de la zone autour du préau. Une pelouse synthétique pourrait aussi remplacer le béton du terrain de foot. Relevons toutefois que, malgré quelques problématiques urbanistiques et tensions de cohabitation, qui – soit dit en passant – se retrouvent dans de nombreux quartiers, les Cressinois que nous avons rencontrés sont unanimes : il fait bon vivre à Cressy !
Bibliographie :
- Breviglieri, M. (2007). L’arc expérientiel de l’adolescence : esquive, combine, embrouille, carapace et étincellement. Éducation et sociétés, 19, 99-113.
- Chamboredon, J.-C. (1971). La délinquance juvénile, essai de construction d’objet. Revue française de sociologie, 12, 349-359.
- Sennett, R. (2012). Ensemble, pour une éthique de la coopération. Paris : Albin Michel.
- Thomas, M-P. & Pattaroni, L. (2012). Choix résidentiels et différenciation des modes de vie des familles de classes moyennes. Lausanne : EPFL ENAC INTER LASUR.
Réalisation :
Jennifer Peters (HETS-GE), Camila de Oliveira (HETS-GE), Sarah Morier (HETS-GE), Olga Petrova (HETS-GE).